Après un édito de Jean Daniel

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Je me suis permis, à la suite d'un édito dans le Nouvel Observateur, d'envoyer, le 6 février 2004, le courriel suivant à Jean Daniel, auteur de l'édito et Directeur du Journal....

J'ai réagi à cet article parce qu'il est assez représentatif d'une manière de réécrire l'histoire que je refuse absolument.

A la date du 20 mars, je n'ai pas encore reçu de réponse à mon courriel. Je n'en suis, hélas, pas surpris. Il n'est pas impossible que Monsieur Daniel ait pris en compte quelques remarques sur la vérité historique. Il faudrait qu'il écrive de nouveau sur le sujet, Mais, il faudra pour cela attendre un jour où ce sera de nouveau racoleur. Je ne vais pas veiller les éditos du NouvelObs pour cette très maigre raison.

Monsieur, j'ai reçu, accompagnant une proposition d'abonnement, la dernière livraison (n° 2047) de votre hebdomadaire. Votre éditorial m'a particulièrement intéressé.
Vous y dites :

« Les négociations s'achèveront au début de l'année 1964. C'est le 27 janvier, il y a quarante ans, que la France reconnaît la République populaire de la Chine commu­niste. Elle est le premier de tous les pays occidentaux à le faire. Lorsque le Général dit à Alain Peyrefitte qu'il fait « face à la Russie », il ne dit qu'une partie, certes importante, de la vérité. »

Avant cette époque, Paris reconnaissait le gouvernement de Taiwan comme étant celui de toute la Chine. La reconnaissance de Pékin s'est faite sans que Paris rompe avec Taipei. C'est Chiang Kaishek qui a pris cette initiative, au grand regret, je le pense, de de Gaulle. Il ne s'agissait donc pas de reconnaître ou de ne pas reconnaître la Chine, mais de reconnaître un gouvernement. Il est d'ailleurs à noter qu'il a fallu attendre la lamentable déclaration Friedmann de 1994 pour que la France accepte de plier et d'affirmer qu'il n'existait qu'une seule Chine et que Taiwan en faisait partie.

On note dans tout cela la pollution de la vision française de la Chine dont est très largement responsable M.Peyrefitte. De Gaulle ne lui a probablement pas dites, mais il aurait pu dire les choses que M.Peyrefitte a prétendu/pensé/dit avoir entendu. Vous reprenez dans votre éditorial une phrase brillante, de celles que l'on écrit mais que l'on ne dit pas, citée par Peyrefitte à l'occasion du 30ème anniversaire de l'établissement des relations diplomatiques entre la France et la RPC (et non la Chine, ces dernières n'ayant jamais été rompues). Je suppose que vous parlez de ce qui s'est dit lors du colloque tenu au Palais du Luxembourg à cette occasion. J'y étais. M. Peyrefitte semblait ce jour là se souvenir d'avoir entendu le Général de Gaulle lui avoir tenu beaucoup de discours. Il lui aurait même affirmé que la France avait vis à vis de la Chine « un devoir d'ingérence » !! Peu gaullienne cette idée ! Parmi les désinformations répandues par ce grand manipulé : le premier pays occidental à avoir reconnu Pékin serait la France. Quid du télégramme envoyé par le Royaume Uni, le 6 janvier 1950 ? On y reconnaissait pourtant que le gouvernement de la RPC était le gouvernement de jure de la Chine. (pour une histoire plus complète des relations vues par Pékin, http://www.chinese-embassy.org.uk/eng/wjzc/t27071.htm). Pour ne pas parler de petits pays comme la Suède (9.5.1950), le Danemark (15/5/1950), la Suisse, la Finlande, la Norvège, les Pays Bas (1954)

Un peu plus loin, vous dites « A l'époque, on savait déjà beaucoup de choses sur la dictature, les purges, les arrestations massives, l'usage de la torture, les famines organisées ou non des populations de l'immenses Chine ». Et vous soulignez que les Etats, qui sont « par définition » des « monstres froids » n'ont pas tenu compte de ces faits. J'aurais aimé lire sous votre plume quelques mots sur les « intellectuels », les « humanistes », les « hommes et femmes de coeur » qui n'étaient pas au pouvoir à cette époque et qui soutenaient Mao, et qui l'ont encore longtemps soutenu. Quelle excuse pour eux ?

Vous écrivez, en encadré central « Le réalisme politique commande de traiter avec la Chine, mais pas n'importe comme,nt ni à n'importe quel prix » Oh que vous avez raison ! Dommage de mélanger autant de choses dans l'argumentaire.

A votre disposition pour en parler davantage

Cordialement

Jean-Vincent Brisset